Je l’aime bien moi, Rodgeur. Un magnifique joueur de tennis, un magicien qui sort des coups extraordinaires. Un héros national des temps modernes. Un modèle pour nous tous. Mais bon, à force de nous le servir à toutes les sauces, ces satanés pubards vont finir par nous lasser…
Étiquette : ambassadeur
Le patron de Virgin maîtrise parfaitement son image: toujours de bonne humeur, sympa, il se montre décontracté, sans cravate, avec sa coiffure de vieux surfeur sur le retour, un sourire inamovible aux lèvres. Il n’a pas non plus peur du ridicule et se met volontiers en scène. En plus, il place systématiquement l’humain (client ET employé) au centre de son discours.
Un exemple: quand Linkedin demande à tout un tas de managers quel serait l’objet dont il ne pourrait pas se passer, la plupart parlent de leur Blackberry ou d’un fétiche tout à fait personnel. Il n’y a que Richard Branson pour répondre qu’aucun gadget au monde ne pourra remplacer son assistante personnelle. Il nous laisse même sous-entendre que c’est elle qui fait tourner la boutique. Un peu facile et démago? Peut-être bien.
Un patron pas comme les autres
C’est pourtant l’attitude qu’il affiche constamment: celle d’un manager différent, atypique. Quand Virgin inaugure une nouvelle ligne à destination d’Edimbourg, c’est lui qui va jouer les stewards, et porte un kilt en bonus. Quand il part à la rencontre de ses collaborateurs, il fait le clown et se montre accessible. Il participe à des expéditions dans la nature. Bien sûr, on peut aimer ou non, on peut y croire ou pas. Mais l’effet de cette attitude sur la marque Virgin est difficilement contestable.
Richard Branson professe le fun sur la place de travail, la prise de risques, le droit à l’erreur. A ses yeux dit-il, la seule chose importante dans une entreprise, ce sont les gens qui la composent. Il ne parle jamais d’argent ou de rentabilité. Non, ce que monsieur Virgin dit, c’est que rien ne compte plus que l’expérience client.
Alors posture ou imposture? C’est vrai que par moments on a l’impression qu’il en fait un peu trop. Il peut même agacer. Mais difficile de débattre sur la sincérité de son discours sans avoir rencontré le bonhomme ou travaillé dans ses entreprises. Ce qui est sûr, c’est que Richard Branson cultive son image avec une constance et une énergie remarquables. Et qu’en retour, l’image de Virgin est bien plus fun et attractive que celle de ses concurrents.
Yahoo a dévoilé un nouveau logo. Il me fait penser à Harry Potter et je ne suis pas sûr de mieux l’aimer que l’ancien, mais ce n’est pas la question. Aujourd’hui, je m’intéresse à la façon dont Yahoo utilise cet événement pour consolider le développement de son image à travers sa très médiatique CEO, Marissa Mayer.
Depuis qu’elle est arrivée, Marissa Mayer s’exprime beaucoup, on la voit partout. Il faut dire que c’est une belle jeune femme, ce qui permet à la fois de trancher avec les autres géants du digital, d’attirer l’attention des médias et de séduire le public. Et cette image sympa et accessible rebondit sur Yahoo. C’est bien simple, elle est systématiquement utilisée comme le visage et la voix de son entreprise: le lancement du nouveau logo obéit lui aussi à la même stratégie.
La patronne aux commandes
En marge de la présentation officielle, la belle Marissa raconte en effet « la véritable histoire » de ce nouveau logo sur son Tumblr. On apprend donc qu’elle adore Adobe Illustrator et qu’elle a mis la main à la pâte: le nouveau logo est né à l’issue d’un week-end de travail intense de la CEO et de son équipe de designers. Mais ils se sont bien marrés.
“On a personal level, I love brands, logos, color, design, and, most of all, Adobe Illustrator. I think it’s one of the most incredible software packages ever made. I’m not a pro, but I know enough to be dangerous 🙂
So, one weekend this summer, I rolled up my sleeves and dove into the trenches with our logo design team […]. We spent the majority of Saturday and Sunday designing the logo from start to finish, and we had a ton of fun weighing every minute detail.”
– Marissa Mayer, Geeking Out on the Logo
Maîtrise du storytelling
Peu importe que le récit soit authentique ou monté de toutes pièces: avec cet épisode du nouveau logo, Marissa Mayer renforce son image de patronne cool et non-conventionnelle d’une entreprise cool et non-conventionnelle (dont le logo est « fantasque, violet et avec un point d’exclamation »!)
- elle retrousse ses manches et se met au boulot elle-même sur un sujet d’une extrême importance (la marque Yahoo (est valorisée à 10 milliards de dollars)
- elle sait utiliser Illustrator et se pose en « geekette » (le titre de son article est d’ailleurs Geeking Out on the Logo), même si un vrai geek c’est autre chose
- elle travaille dans la bonne humeur: entre les lignes, on entrevoit des cartons de pizza, des canettes de coca, des fous rires et des batailles de pistolets à eau dans les couloirs déserts de chez Yahoo
- elle respecte l’avis de ses collaborateurs: on apprend qu’un sondage a permis de connaître les attentes des employés envers un nouveau logo
L’opération communication est donc réussie et on parle de Yahoo dans les médias… même si tout le monde ne se laisse pas avoir!
L’utilisation d’une célébrité dans une action de communication est une technique assez fréquente, en particulier dans le luxe et le sport. Elle a d’ailleurs fait ses preuves et permet entre autres:
- un degré d’attention accru de la part du public, puisqu’il connaît la personne
- une plus forte crédibilité du message, car la personne est souvent considérée comme un modèle, une source d’inspiration
- un transfert d’image, soit le report par le public de l’affection ou l’admiration qu’il éprouve pour la personne sur la marque qui l’utilise
Mais il y a une règle d’or pour que ça fonctionne: c’est à la marque de s’adapter au style de la personne utilisée, et non le contraire.
Prenons l’exemple de cette campagne avec Xenia Tchoumitcheva. La marque de fabrique de la Tessinoise, c’est son côté peste, la petite poupée boudeuse, dédaigneuse. Carrément l’opposé de ça:
Cette campagne, c’est du gâchis. Si on veut une jeune fille de bonne famille qui sourit de toutes ses dents, on peut certainement trouver tout plein de modèles qui feront ça très bien. Si on utilise Xenia parce qu’elle est connue et qu’on espère déclencher les réactions expliquées au début de cet article, alors il faut faire du Xenia. C’est-à-dire quelque chose dans ce goût-là:
Sans cela, l’action n’atteint pas son but et la marque:
- ne génère pas d’attention parce qu’on ne reconnait pas vraiment la personne
- n’est pas crédible car la personne est utilisée à contre-emploi
- ne bénéficie pas du transfert d’image car les admirateurs de Xenia risquent d’être déçus de la façon dont elle est traitée.
Cet article m’a été inspiré par une affiche de cette compagnie d’assurance. Je me suis dit: « Qu’est-ce qu’ils lui ont fait à Rodgeur? On dirait Sean Penn! » Bon, j’avoue que depuis, j’ai passé pas mal de temps à regarder des photos de Sean Penn et je n’arrive pas à en trouver une qui vient confirmer mon impression. Mais je suis sûr que vous voyez ce que je veux dire.