Fils de pub, bête de com.

Le blog de Romain Pittet vous propose un bouquet de réflexions amusées servi sur un lit de commentaires soigneusement émincés. Tout l'assortiment est cultivé à la main au cours de longues journées de travail dans le domaine de la communication et des relations publiques.

Suisse-France sur Twitter à la RTS

Le 20 juin dernier, la RTS a proposé une opération originale en marge du match Suisse-France: la chaîne suisse a invité 11 twittos français à venir affronter 11 Suisses dans un match verbal où chacun incarnait l’un des joueurs présents sur la pelouse brésilienne. J’ai pour ma part eu le plaisir de jouer au porte-parole pour Rodriguez. Avec cette action inédite, la RTS souhaitait poursuivre ses expériences sur l’utilisation des médias sociaux en second écran, proposer un divertissement original au public romand et aussi renforcer ses liens avec la twittosphère romande et francophone.

L’opération était lancée à l’initiative de David Labouré, Responsable des relations en ligne à la RTS, et de Serge Gremion, qui pilote le Laboratoire numérique, cellule d’expérimentation digitale de la chaîne. Loin d’être un caprice de deux passionnés, elle a reçu l’aval de la direction, comme en témoignait la visite du grand patron de la chaîne, Gilles Marchand, venus encourager les participants avant le match.

Le dispositif était ambitieux: un studio entier était réservé à l’opération. Au sol, une fausse pelouse avec le marquage dun terrain de foot. Sur chaque moitié, quatre tables offrant une vue imprenable sur un grand écran qui retransmettait le direct. Un autre écran proposait une plateforme réalisée par shore.li, qui reprenait l’ensemble des tweets marqués du hashtag #RTSmondial: ceux des twittos invités et ceux du public. Enfin, alors qu’une caméra filmait tout ce petit monde en continu, un caméraman se baladait dans le studio pour observer les protagonistes. Un arbitre impartial, incarné par le journaliste sportif Alberto Montecissa, a expliqué l’opération durant un duplex avec le studio principal (sautez à la 27e minute).

Match fou
On nous avait demandé de réagir avec humour aux événements du terrain plutôt que livrer un commentaire sportif sérieux. « Lâchez-vous », renchérissait d’ailleurs le chef du service des sports Massimo Lorenzi quelques minutes avant le coup d’envoi. Il n’a sans doute pas été déçu. Dès le début de la rencontre, les vannes ont fusé. Accompagnant la tournure du vrai match, le « chambrage » bon enfant des premières minutes a vite laissé sa place à des fanfaronnades bleues d’un côté et une belle mauvaise foi helvète de l’autre.

Entre les vannes en série, la déconne de haut niveau les, memes et autres clins d’œil à la culture geek, difficile parfois de se souvenir de quel joueur on devait incarner. Résultat: un match fou où les postes n’ont pas été tenus de manière très stricte, à l’image de cette tablée qui réunissait Rodriguez, donc moi, Benaglio (Matthias Lüfkens) et… Shaqiri (Sandro Todobom).

Analyse à chaud
Autant le dire tout de suite: je me suis marré comme un fou, c’était vraiment une excellente soirée. Les quelques réactions que j’ai reçues du public étaient elles aussi très positives. Opération réussie pour la RTS, donc? Oui bien sûr, mais il y a aussi quelques leçons à tirer. On remarque en effet que le résultat aura été un peu hybride: à cheval entre le jeu de rôle promis et un divertissement très éloigné des aspects sportifs.

Si l’objectif est de proposer un divertissement, un point de vue décalé sur le match, mieux vaudrait réduire le nombre de twittos. A 11 contre 11, ça fait tout simplement trop de monde pour suivre ce qui se dit et interagir. Les chiffres parlent tous seuls: 1300 tweets publiés par les twittos de l’opération durant les presque deux heures de match, ça fait en gros un tweet toutes les 6 secondes! Raison pour laquelle les interactions ont été limitées: plutôt entre les wittos et leurs suiveurs, un peu à l’intérieur des « équipes » et presque pas avec des joueurs de l’équipe adverse (lire l’analyse de Pegasus Data Project).

A l’inverse, si on souhaite s’en tenir au jeu de rôle à l’origine du concept, alors il faudrait prendre le temps de permettre aux deux équipes de mieux se connaître, savoir qui est qui pour faciliter le dialogue entre les joueurs. Il faudrait aussi ajuster la tonalité et la teneur des tweets. Garder un lien assez fort avec ce qui se passe sur le terrain, réagir aux événements du vrai match, véritablement se mettre dans la tête des joueurs… et y rester.

Je me réjouis de pouvoir discuter de mon analyse avec David et Serge. En tout cas, c’est le propre de toute expérience de permettre de vérifier certaines hypothèses, d’étudier des comportements et d’en tirer des enseignements. On verra dans les prochains mois ce que cette belle soirée aura apporté à la RTS!

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Gruyère: un petit goût de déjà vu

Depuis le début 2014, le plus célèbre fromage de Suisse s’est lancé dans une nouvelle campagne publicitaire. A la poubelle, le « N’oublie jamais d’où il vient » qui faisait appel au patriotisme gruyérien. Dépassé, le « Ça calme » qui tentait de rendre au Gruyère intemporel sa place dans la vie trépidante du 21e siècle (HT Sébastien Galifier et l’agence ACP).

Désormais, c’est par l’humour que le Gruyère essaie de séduire le public. La nouvelle campagne est en effet une série plutôt amusante de clichés qui montre que le Gruyère est un fromage pour tout le monde: chaque sujet est une situation où un petit commentaire vient répondre à une mise en scène impliquant un ou plusieurs morceaux de fromage.

Sympa, certes, mais absolument pas nouveau: cela fait des années que la pomme de terre suisse est vendue de la même manière! Et si on remonte encore un peu dans le temps, on retrouve une campagne Heineken, sponsor de nombreux événements musicaux, qui jouait habilement avec le produit. Décidément, everything is a remix.

Comme je vous aime, je vous ai même créé une petite galerie de visuels. Surtout que certaines de ces pubs sont assez anciennes et difficiles à trouver sur le web. D’ailleurs, on dirait bien que la campagne Heineken était une production suisse!

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Nouveaux Rivella: des aberrations génétiques

« De quelle couleur est votre soif? » Depuis plus de soixante ans, Rivella nous a habitués à un choix extrêmement simple: rouge, bleu ou vert. (Ou jaune pour un temps, mais ça n’a pas duré.) Et là, patatras, il viennent de tout chambouler en renonçant à cette « Brutal Simplicity » si chère aux frères Saatchi.

Cette semaine, Rivella vient de lancer deux nouvelles variétés, aromatisées à la pêche et à la rhubarbe. Aromatisées, mais aussi nommées pêche et rhubarbe. C’est là que ça ne va pas: ce ne sont pas des couleurs. On sort donc de la lignée des classiques de la marque, ce qui est une grossière erreur de branding.

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Dans son fameux livre Pourquoi la vache qui rit ne pleure jamais, Frank Tapiro explique que, comme chacun d’entre nous, les marques sont dotées d’un génome. La somme d’un certain nombre de valeurs fondamentales qui ne doivent pas être trahies, sous peine de faire perdre à la marque ce qui la rend unique, ce qui fait son âme et donc son succès. Si Frank était suisse, il aurait sûrement consacré un chapitre de son bouquin à Rivella et sa gamme de produits au nom de couleurs.

« Pourquoi les gens naissent-ils? Pourquoi meurent-ils? Et pourquoi cherchent-ils dans l’intervalle à porter le plus souvent possible une montre à quartz numérique? »
– Douglas Adams

De cette transition totalement incongrue, retenons le mot « pourquoi »: pourquoi diable les dirigeants de Rivella ont-ils accepté une pareille aberration génétique? Eh bien c’est probablement pour des raisons internes (ce qui n’est absolument pas une excuse).

Si on creuse un peu, on peut en effet se rendre compte que les nouvelles boissons ne sont pas de simples Rivella, mais des Rivella « Cliq ». Pourquoi Cliq? Parce que la création de cette nouvelle gamme a suivi un processus de crowdsourcing: la communauté des fans a été sollicitée à chaque étape.

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Alors j’imagine que du côté de Rivella, on a voulu valoriser cette démarche de crowdsourcing (qui a certainement été vendue comme hyper-tendance par une agence créative qui retarde un peu). Mais regardons les choses en face: soit les nouveaux Rivella crowdsourcés sont des Rivella à part entière et on les appelle Rivella orange et Rivella rose. Soit ce sont des sous-Rivella et dans ce cas ils ne méritent pas de porter ce nom, même nuancé de la mention Cliq.

Au final, pour valoriser une démarche purement interne, Rivella arrive à un résultat qui, en plus d’être totalement contraire aux fondamentaux de la marque, est incompréhensible pour le consommateur qui ne fait pas l’effort de s’informer. Pour moi, c’est raté. Mais bon, je vais quand même les goûter, hein. Surtout la version rhubarbe.

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Gil Elvgren: photoshopper AVANT Photoshop

Je suis tombé sur une intéressante collection de visuels du grand maître de la pin-up des années 1950 Gil Elvgren, mis côte à côte avec les photos qui lui ont servi de modèle. Comme aujourd’hui, ce sont déjà de belles femmes, mais leur version dessinée montre des visages et des corps un peu plus fins, des poitrines améliorées. Pas de doute, Gil Elvgreen faisait du photoshoppage avant l’heure!

Gil Elvgren pin-up

Une coiffure stylisée, mais surtout un visage légèrement affiné, tout comme les bras, la taille et les jambes.

 

Gil Elvgren pin-up

Une poitrine améliorée, une taille affinée et une coiffure stylisée.

« It’s interesting to see that the way Elvgren alters his models’ bodies is similar to the way that photos are altered now with Photoshop. »

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Trois pistes pour lutter contre les clichés dans la pub

Ça vous a fait rire? Moi aussi: mis bout à bout et commentés, tous ces clichés publicitaires paraissent vraiment ridicules. A force de les voir et de les revoir, on n’aurait presque fini par l’oublier! Du coup, pour les publicitaires et autres professionnels de la communication, l’envie est grande de sortir du cliché et de trouver une autre approche. Quelques pistes avec trois exemples récents.

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Le discours vrai, direct et transparent
Oubliées les métaphores visuelles et les formules toutes faites! Arrêtons de prendre les consommateurs pour des idiots, appelons un chat un chat et soyons honnêtes. Evidemment, ça marche mieux quand on peut dire: « Voici quelque chose de totalement nouveau qui va changer votre vie » plutôt que: « Votre pognon nous intéresse. »

L’exemple: l’assurance-maladie Oscar.

« Hello New York, We’re Oscar,
A new kind of health insurance company that is using technology to make insurance simple, intuitive, and human. In other words, the kind of healthcare we want for ourselves. »

 

 

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L’humour et le décalage
C’est l’un des ressorts classiques de la pub: l’humour permet de générer un capital-sympathie important auprès du public, mais aussi d’attirer l’attention et de faciliter la mémorisation. On se rappelle toujours de quelque chose qui nous a fait rire. Et un objet ou un personnage incongru nous intrigue suffisamment pour qu’on le garde un moment à l’esprit.

L’exemple: Hotels.com et Captain Obvious

« ‘All you can eat’ is a hotel policy that allows you to eat all that you can. »

 

 

 

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Un territoire de communication unique
Pour éviter les clichés, rien de tel qu’adopter la démarche diamétralement opposée: une approche véritablement personnelle. Là, il s’agit d’utiliser un style visuel et verbal qui n’appartient qu’à vous. Que non seulement aucun concurrent direct, mais aussi aucune autre marque connue n’emploie. Ce qui est unique ne peut pas être cliché et apportera une vraie personnalité à la marque.

L’exemple: Air France et sa nouvelle campagne « France is in the air », qui joue sur une certaine image de la France en mêlant joyeusement symboles royaux, notions révolutionnaires, mode et gastronomie. Des clichés c’est vrai, mais remixés de façon originale pour apporter une tonalité unique à la compagnie aérienne.

« France is in the air »

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